La « zone franc » se compose elle-même de trois zones disposant chacune d’une banque centrale et de leur propre monnaie arrimée à l’euro et imprimée en France. Il s’agit de :
la zone de l’Union monétaire Ouest africaine (UMOA) qui se compose de huit États : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Ces pays utilisent le franc CFA d’Afrique de l’Ouest (ou XOF) ;
la zone de l’Union monétaire d’Afrique centrale (UMAC) qui se compose de six États : le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République centrafricaine et le Tchad. Ces pays utilisent le franc CFA d’Afrique centrale (ou XAF) ; et l’Union des Comores qui utilise le franc comorien (ou KMF).
Chaque pays est libre de rejoindre, de rester et de quitter temporairement (comme l’a fait le Mali de 1962 à 1984) ou définitivement (à l’image de la Guinée, de la Mauritanie et de Madagascar respectivement en 1960, 1973 et 1975) sa zone franc.
La participation des pays membres repose sur des accords bilatéraux et, depuis 1962, sur des accords de coopération avec les Unions monétaires régionales.
La souveraineté monétaire et les décisions sont de la responsabilité des trois banques centrales communes et indépendantes, où siègent les États membres de la zone franc : la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) au Sénégal ; la Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) au Cameroun et la Banque Centrale des Comores (BCC).
Les décisions de politique monétaire sont prises à l’échelle régionale. La France dispose d’une représentation minoritaire au sein du comité de politique monétaire et du conseil d’administration de la BEAC (un administrateur français sur sept).
Le conseil d’administration de la BCC se compose, quant à lui, de huit membres désignés pour moitié par le gouvernement français. Enfin, suite à la réforme de la coopération monétaire en zone UEMOA annoncée en 2019, la France n’est plus présente dans les instances de gouvernance de la BCEAO. Cette réforme, dont la mise en œuvre et le calendrier dépendent exclusivement de l’UEMOA, repose sur quatre piliers : le changement de nom de la devise. Les autorités de l’UEMOA ont indiqué leur souhait de passer du « franc CFA » (XOF) à l’« ECO »; la suppression de l’obligation de centralisation des réserves de change sur le compte d’opérations au Trésor français ; le retrait de la France des instances de gouvernance de la zone ; la mise en place concomitante de mécanismes ad hoc de dialogue et de suivi des risques.
Le régime de change demeure inchangé, avec le maintien de la parité fixe entre l’euro et la devise de l’Union, ainsi que de la garantie de convertibilité assurée par la France.
La réforme du franc CFA devrait se poursuivre dans les années à venir. La CEDEAO a ainsi lancé un projet de devise commune en deux phases : les pays qui disposent de leur propre devise (Cap-Vert, Gambie, Ghana, Guinée, Liberia, Nigeria et Sierra Leone) lanceront une monnaie commune ; les huit membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) – Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo –, qui ont en commun le franc CFA, devraient adopter cette nouvelle monnaie, afin que tous l’utilisent en 2027. D’ici là, les pays de la zone franc devront achever les réformes du franc CFA engagées fin 2019, avec la signature d’un nouveau traité monétaire avec Paris.
Le franc CFA fait l’objet de critiques nourries depuis sa création ([49]). Celles-ci dénoncent un outil néocolonial au service de politiques « françafricaines », la centralisation des réserves au Trésor public français vue comme une preuve patente du manque de souveraineté monétaire, la fabrication des billets en France, l’ancrage fixe à l’euro là où un arrimage à un panier de monnaies correspondrait davantage aux réalités dynamiques des échanges internationaux ou encore le caractère restrictif de la politique monétaire associée.
Ces critiques ont gagné en audience et en visibilité sous l’influence de chocs exogènes qui ont touché la monnaie : dévaluations du franc, crise de l’endettement, dévaluation du franc CFA, passage à l’euro, etc. Selon les périodes, les critiques plus politiques (néocolonialisme) ont pris le dessus (années 1960-1970) ; à d’autres moments, ce sont les critiques économiques qui ont été les plus audibles (à partir des années 1980).
La période actuelle intègre et amalgame les différents arguments politiques, économiques, géopolitiques et panafricanistes ; elle a également vu ces critiques nourrir un temps le mouvement social (Sénégal, Mali, notamment), avant de devenir l’un des principaux sujets de contestation dirigée contre la France en Afrique de l’Ouest.
Sources diverses